Revue de presse Gouvernance et politiques publiques | décembre 2021

Santé

Ce mois-ci, le gouvernement égyptien a commencé l’injection de doses de rappel du vaccin contre la Covid-19 pour les gens qui ont reçu leur seconde dose il y a 6 mois ou plus. D’après le ministère de la Santé, 400 000 personnes ont été contactées par SMS pour prendre rendez-vous. Si les personnes souffrant de maladies chroniques, les personnes âgées et le personnel médical sont officiellement prioritaires, les personnes non-vulnérables ont en réalité déjà accès au rappel et peuvent se présenter aux centres de vaccination sans avoir reçu de SMS officiel. D’après les informations officielles, près 50 millions de personnes, soit la moitié de la population, aurait désormais reçu au moins une dose de vaccin.

Concernant le variant Omicron, les voyageurs qui avaient été en contact avec trois personnes en provenance d’Afrique du Sud ayant été testées positivement au variant ont finalement été testés négativement. Des tests sont conduits à l’aéroport du Caire pour toutes les personnes arrivant des pays où le variant aurait été détecté. Les égyptiens qui reçoivent des tests positifs sont isolés dans des hôpitaux de fièvre, tandis que les étrangers sont renvoyés dans le pays d’où ils viennent.

Par ailleurs, à la mi-décembre le Premier ministre a annoncé de nouvelles mesures pour éviter la diffusion du virus : obligation du port du masque dans les écoles, universités, mosquées, banques, théâtres et transports ; interdiction de l’organisation de mariages, funérailles, anniversaires ou autres célébrations dans des lieux fermés – alors que les prières funéraires dans certaines grandes mosquées avaient été ré-autorisées au début du mois pour la première fois depuis le début de la pandémie par le Comité suprême de gestion des épidémies et des pandémies, instauré en vertu de la nouvelle « loi pandémie » – ; interdiction de la chicha dans les restaurants, cafés et hôtels. Les vols vers l’Afrique du Sud ont quant à eux été finalement rétablis le 16 décembre, après avoir été suspendus pendant deux semaines.

Pendant ce temps, des accusations de corruption secouent le ministère de la santé : quatre fonctionnaires ont été renvoyés devant un tribunal correctionnel suite à une enquête ouverte il y a deux mois. L’ouverture de cette enquête avait coïncidé avec le départ en congé maladie de la ministre de la Santé Hala Zayed suite à une crise cardiaque, synchronie qui avait alimenté des rumeurs sur l’implication de la ministre dans ces affaires de corruption. Si cette dernière n’a cependant pas été inculpée, un des quatre accusés – dont les identités n’ont pas encore été révélées – serait un de ses principaux assistants. L’un des prévenus est accusé d’avoir demandé un pot-de-vin de 5 millions de EGP aux propriétaires d’un hôpital privé en échange de quoi il aurait usé de son influence afin d’empêcher la fermeture de l’hôpital pour défaut de licence. Deux autres accusés ont été inculpés de « médiation dans la corruption », tandis que le quatrième a été accusé de « préparer un faux rapport » sur l’hôpital.

D’après Mada Masr, le départ officiel d’Hala Zayed de son poste de ministre devrait bientôt être annoncé. Elle serait remplacée par l’actuel ministre de la santé par intérim, le ministre de l’enseignement supérieur Khaled Abdel Ghaffar, et un nouveau ministre de l’enseignement supérieur devrait être nommé.

Par ailleurs, mi-décembre l’Égypte a accueilli la Conférence des États parties à la Convention des Nations unies contre la corruption à Sharm el-Sheikh.

Justice

L’activiste Alaa Abd El Fattah a finalement écopé de 5 ans de prison, tandis que son avocat Mohamed Baqer et le bloggeur Mohamed Ibrahim alias Oxygen ont été condamnés à 4 ans de prison à l’issue de leur procès, dont le verdict a été prononcé le 20 décembre dernier. Abd El Fattah, Ibrahim et Baqer avaient été déférés devant un tribunal d’exception en octobre dernier, quelques jours avant que le président Abdel Fattah al-Sissi n’annonce la fin de l’état d’urgence en vigueur depuis 2017. Le procès s’étant déroulé devant un Tribunal des délits de sécurité de l’Etat d’urgence, le verdict ne peut donc faire l’objet d’aucun appel. Les peines ont été prononcées après seulement trois séances de procès, alors que les avocats de la défense n’ont pas eu accès aux dossiers ni la possibilité de présenter une défense. Le verdict doit désormais être ratifié par le Président de la République pour être finalisé ; le seul recours possible serait de soumettre un grief au chef militaire – le Président de la République.

Il n’est pas encore clair si les deux années déjà écoulées en détention provisoire depuis leurs arrestations en septembre 2019 seront déduites de leurs peines, notamment parce que l’enquête qui a finalement été renvoyée devant les tribunaux est différente de celle pour laquelle ils ont été arrêtés la première fois. Cependant, d’après l’avocat de Mohamed Baqer, Ahmed Ragheb, ces deux années devraient être comptabilisées puisque les inculpés ont été accusés de la même chose dans les deux enquêtes, notamment de diffusion de fausses nouvelles. Le Parquet devrait préciser ces informations prochainement. Peu avant le verdict, le ministère fédéral des Affaires étrangères de l’Allemagne a appelé à la libération des trois accusés et à un procès équitable, estimant que l’issue du procès serait un indicateur de la situation des droits de l’homme en Égypte. Les autorités égyptiennes ont réagi en dénonçant une ingérence dans les affaires intérieures du pays. Le département d’État américain a également exprimé son « mécontentement » à l’issue du verdict, commentaire jugé inapproprié par le porte-parole des Affaires étrangères égyptiennes Ahmed Hafez. Le 1er décembre, un groupe d’experts des Nations-Unies avaient appelé à la libération immédiate des trois accusés.

Le chercheur Patrick Zaki, étudiant à l’Université de Bologne et spécialiste des questions de genre qui avait été arrêté le 7 février 2020, a finalement été libéré début décembre, après avoir passé 22 mois en détention provisoire, accusé de diffusion de fausses nouvelles. Cependant, ce dernier n’est pas acquitté, et il devra se présenter devant le Tribunal d’urgence de la Surêté d’Etat, une cour d’exception, pour la suite de son procès en février prochain. Il aurait par ailleurs l’interdiction de quitter le territoire égyptien.

Ola al-Qaradawi, la fille du théologie islamiste Yusuf al-Qaradawi, placé sur la liste terroriste et actuellement en exil, a également été libérée le 12 décembre après avoir passé 4 ans en prison.

Plus de 11 ans après la disparition de Khaled Saïd en juin 2010, battu à mort par des policiers à Alexandrie et dont l’assassinat avait été un détonateur de la révolution du 25 janvier, un tribunal a ordonné à deux officiers de police et au ministère de l’intérieur de verser aux héritiers de Saïd un million d’ EGP en réparation des dommages moraux et matériels subis, d’après le Centre égyptien pour les droits économiques et sociaux (ECESR) qui a porté l’affaire devant la justice. Un officier et un sergent de police avaient été condamnés pour le crime à sept ans de prison, puis à dix ans en mars 2014 après avoir fait appel du verdict initial. La demande d’indemnisation déposée par l’ECESR en mars 2018, au nom de la sœur et de la mère de la victime – décédée depuis -, exigeait à l’origine une compensation de 2 millions d’EGP. L’ECESR envisage de déposer un appel pour obtenir la somme totale exigée.

Culture

Un décret présidentiel a dévoilé la composition du conseil d’administration du futur Grand Musée Égyptien. Le Président de la République sera à la tête du conseil, dans lequel siégeront les ministres des finances, de la culture et des antiquités. L’ancien ministre de la culture de Hosni Moubarak, Farouk Hosni, jugé après la révolution de 2011 pour corruption avant d’être acquitté figurera également parmi les membres du conseil, ainsi que Zahi Hawas, ancien ministre des antiquités sous Moubarak et également jugé pour des crimes similaires avant d’être acquitté. Parmi les autres membres figurent le directeur de la Banque nationale d’Égypte, Hisham Okasha, l’ancien gouverneur de la banque centrale, Farouk al-Oqda, l’homme d’affaires Mohamed Lotfy Mansour et Sherif Amer, présentateur de la chaîne de télévision à capitaux saoudiens MBC Masr. Le conseil comprend également des membres non-égyptiens, tels que le Prince saoudien Ben Salman, le directeur du Metropolitan Museum Ben Elliot ou encore le secrétaire général de l’Organisation mondiale du tourisme.

Par ailleurs, une délégation égyptienne a récupéré ce mois-ci en Espagne 36 pièces archéologiques, qui avaient été introduites clandestinement dans le pays en 2014. Lors de son voyage au Caire en décembre, le ministre israélien des Affaires étrangères a également rendu à l’Égypte des dizaines d’objets qui avaient été introduits clandestinement en Israël. La France avait aussi restitué à l’Égypte une centaine d’objets en juin dernier.