Revue de presse Gouvernance et politiques publiques | septembre 2021

Nouvelle « stratégie » pour les Droits de l’homme

Mi-septembre, les autorités ont lancé lors d’un évènement à la nouvelle capitale administrative une nouvelle stratégie pour les Droits de l’homme. L’année 2022 a ainsi été déclarée par le président Abdel Fattah el Sissi « année de la société civile ».

L’ambition de cette stratégie a émergé en novembre 2018 avec la création du Comité suprême permanent des droits de l’homme dirigé par le ministre des Affaires étrangères et comprenant des membres des ministères de la Défense, de l’Intérieur, de la Justice, des Affaires parlementaires et de la Solidarité sociale, ainsi que du Service des renseignements généraux, de l’Autorité de contrôle administratif, des conseils nationaux pour les femmes, l’enfance et la maternité et les personnes handicapées, du ministère public et du Service d’information de l’État. Ce comité s’est finalement réuni en juillet 2020, et une première ébauche de la stratégie a été présentée au mois d’octobre suivant, dont la version finale a été approuvée début juin dernier. Elle comporte quatre axes principaux : les droits civils et politiques, les droits économiques, sociaux et culturels, les droits des femmes, des enfants, des personnes handicapées, des jeunes et des personnes âgées et les droits à l’éducation.

Plusieurs aspects sont abordés, tels que l’état des prisons (modernisation, visites du Conseil national pour les droits de l’homme, plaidoirie contre la torture), la justice (notamment la protection des victimes et témoins), la liberté d’expression (droit d’expression et de réunion pacifique, lois pour la protection des journalistes), la coordination avec la société civile. Dans le cadre judiciaire, des solutions alternatives à la prison sont envisagées dans le cas de non payement de dettes. La stratégie incite également à réexaminer les chefs d’accusations pour l’application de la peine de mort. Une partie du développement angle porte sur le renouvellement du discours religieux et la « purification » des programmes d’enseignements et des médias promouvant toute forme d’extrémisme.

Etablie sur 5 années, cette stratégie émerge après de nombreux appels, notamment de l’Assemblée Générale des Nations-Unies, aux autorités égyptiennes. En mars dernier, 31 pays ont signé une déclaration au Conseil des droits de l’homme des Nations unies condamnant le bilan de l’Égypte en matière de droits de l’homme.

Les États-Unis ont également annoncé mi-septembre qu’un peu plus de 10 % de l’aide militaire de 1,3 milliard de dollars versée annuellement à l’Égypte seraient conditionnée par la clôture de l’affaire des ONGs, entamée il y a plus de dix ans également connue sous le nom d’ « Affaire 173 », et l’abandon des poursuites contre 16 personnes identifiées par les États-Unis abandonnées ce mois-ci en l’absence de preuves suffisantes. Les restrictions individuelles contre les fondateurs de ces associations telles que l’interdiction de voyager et le gel des avoirs ont été levées.

 

Taxer les « YouTubeurs » ?

L’unité de commerce électronique de l’autorité fiscale a appelé les créateurs de contenu sur les réseaux sociaux à ouvrir un dossier fiscal pour s’enregistrer afin de payer des impôts sur les revenus annuels supérieurs à 15 000 EGP, en plus d’une taxe sur la valeur ajoutée pour ceux qui gagnent plus de 500 000 EGP par an. Mada Masr rappelle que l’article 16 de la loi régissant la valeur ajoutée oblige les personnes physiques ou morales exerçant une activité commerciale, vendant des services ou des marchandises, à s’inscrire auprès de l’autorité pour payer la TVA si leurs ventes totales dépassent 500 000 LE au cours de l’année. La décision d’imposer ce régime aux bloggeurs et YouTubeurs peut étonner étant donné que les créateurs de contenus ne vendent pas de bien ou de services. Les « influenceurs » mineurs seraient également sujets à cette régulation si leurs revenus constituent une ressource permanente. Leurs parents devront remplir les documents en leur nom.

 

Suite de la vaccination

A l’approche de la rentrée académique, prévu le 9 octobre prochain, la campagne de vaccination ciblant le personnel éducatif et les étudiants suit son cours. D’après le ministre de l’enseignement supérieur Khaled Abdel Ghaffar, près de 400 000 étudiants à l’université étaient vaccinés à la fin du mois de septembre. Ces derniers peuvent désormais s’inscrire sur le site Web du ministère de la Santé et recevoir leur rendez-vous par SMS dans les 24 heures. Une annonce du cabinet à la mi-août avait en effet stipulé que tout le personnel académique, ainsi que les étudiants de plus de 18 ans devaient obligatoirement être vaccinés avant la rentrée. Cette obligation s’applique également aux employés du secteur touristique qui travaillent dans les villes de la Mer Rouge et du Sud Sinaï. En septembre, le ministre Khaled Abdel Ghaffar a précisé que les étudiants qui refusent le vaccin devront présenter un test PCR hebdomadaire, tandis que les employés du secteur éducatif devront en présenter deux par semaine.

D’après le ministre de l’éducation Tarek Shawqi, 1. 6 millions d’employés du ministère seraient vaccinés – entièrement ou partiellement -, ce qui représente 65% des effectifs du ministère. La suite de la campagne devrait concerner les élèves des lycées et collèges, ainsi que les familles des étudiants et élèves. D’après la ministre de la santé, 16 millions d’égyptiens seraient vaccinés, parmi lesquels 11 millions auraient reçu une dose et 5 millions deux doses.

2.3 millions de doses du vaccin AstraZeneca Germany ont été récemment livrées à l’Egypte par le biais du système COVAX. 250 000 doses d’AstraZeneca ont été également offertes et livrées par la Grèce, et 546 000 doses du même vaccin livrées par la France.

 

Reconstruire la Libye ?

Dans la perspective de concourir aux élections présidentielles en Libye, prévues le 24 décembre prochain, le commandant général de l’Armée nationale libyenne (ANL), Khalifa Haftar, a démissionné de son poste militaire courant septembre.

Cette feuille de route électorale, établie par le Forum de dialogue politique libyen, semble cependant être mise en danger par le retrait récent du soutien de la chambre basse du parlement libyen, la Chambre des représentants basée à Tobrouk, au gouvernement d’unité basé à Tripoli. En mars dernier, le parlement avait en effet approuvé son soutien à un gouvernement d’unité nationale dirigé par le Premier ministre Abdul Hamid Dbeibah jusqu’à la tenue des élections.

Ce dernier s’est par ailleurs rendu en Égypte à la mi-septembre pour poursuivre les réunions du Comité suprême conjoint égypto-libyen, entamées en avril dernier, et ce pour la première fois depuis 12 ans. Ces réunions ont permis la signature de 14 protocoles d’accord et de six contrats exécutifs d’une valeur de plusieurs milliards de dollars dans divers domaines – transport, gestion administrative, industrie et agriculture. D’après le ministre libyen des affaires économiques, Salama al-Ghawil, les entreprises égyptiennes, dont quelques-unes ont déjà commencé à travailler sur certains projets, devraient participer à 60 à 70 % des projets de reconstruction en Libye, les coûts de la reconstruction étant estimé à 111 milliards de dollars sur 10 ans. L’Égypte joue simultanément un rôle important dans les tractations politiques en cours, le Président al Sissi ayant également reçu les visites du président de la Chambre des représentants libyenne, Aguila Saleh, et du Général Khalifa Haftar à la mi-septembre. Le Caire profiterait également du rétablissement récent de ses relations avec la Turquie – au cœur desquelles le conflit libyen est un contentieux central- pour négocier la fin de sa présence militaire en Libye et le retrait de ses troupes mercenaires.