Le wadi est une vallée dans une région semi-désertique, mais c’est aussi les rendez-vous bimensuels des doctorantes du Département des Études Contemporaines de l’Institut français du Proche-Orient. Deux jeudis par mois, un·e intervenant·e est invité·e à présenter ses travaux lors d’une séance de webinaire problématisée autour d’un questionnement méthodologique ou d’une thématique scientifique.
Ces rencontres doctorales ont pour objectif d’accompagner les recherches de thèse, tout en observant une approche pluridisciplinaire qui ouvre sur le paysage élargi des sciences humaines et sociales. Les WADI sont 03aussi l’occasion d’échanger entre les différentes antennes de l’Ifpo et de faire dialoguer leurs contextes politiques et géographiques.
Certaines séances sont consacrées à la présentation de l’avancée des recherches des doctorantes, en invitant un·e chercheur·euse spécialisé·e sur leurs thématiques d’étude.
Les WADI sont ouverts aux doctorant·es associé·es et aux chercheur·euses de l’Ifpo.
Pour plus d’informations sur les séances à venir, assister à ces rencontres et suivre le lit de la rivière, merci de nous écrire à l’adresse suivante : wadi.dec@yahoo.com
Séance 14 – le 24 juin 2021
Une séance avec Roub Kaedbey (Citeres/Ifpo), organisée par Héloïse Peaucelle (Citeres/Ifpo).
Visionnage du film « Le territoire d’exil. Ouzai, Beyrouth » de Rouba Kaedbey et discussion avec la réalisatrice.
Le territoire d’exil
Ouzai, Beyrouth
un film documentaire de
Rouba Kaedbey et Hania Khoury
Durée : 42’
Langue : arabe sous-titré français.
Résumé
En donnant la parole à ses habitants, le documentaire met en lumière Ouzai, un quartier populaire et informel de la banlieue sud de Beyrouth. Celui-ci est façonné par les différentes migrations, conséquences des guerres et conflits régionaux, et par la multiplication des constructions illégales en période d’instabilité. Ce phénomène induit ainsi la coexistence de plusieurs populations de nationalités, religions et ethnies différentes. Les trajectoires bouleversantes d’Abou Reda, Abou Mohamad, Abou A’rab, Santo, Amira, A’lya, et Ibrahim sont représentatives de cette réalité. Leurs histoires d’exil, depuis l’exode palestinien en 1948, en passant par la guerre civile libanaise (1975-1990) jusqu’à la migration syrienne depuis 2011 sont motrices dans la fabrique de l’informalité urbaine à Beyrouth.
Coréalisation : Hania Khoury et Rouba Kaedbey
Scenario et coordination scientifique : Rouba Kaedbey
Montage : Hania Khoury
Directeur de la photographie : Fady Farran
Assistant DOP : Hadi Raghda
Mixage audio : Jean-Philippe Corbellini
Musique originale Lavta : Alexandre Longelin
Rappeur : Santo
Traduction : Rouba Kaedbey
Traduction revue par : Bénédicte Florin, Valentin Maisons et Florence Troin
Séance 13 – le 17 juin 2021
Une séance avec Karen Akoka sociologue et politiste (ISP/Paris Nanterre), organisée par Elsa Maarawi (Amiens).
Construction socio-historique de la distinction réfugié/migrant
Cette intervention présentera une recherche socio-historique menée sur les transformations de la catégorie de réfugié et la rigidification de la distinction réfugié/migrant à partir d’une focale posée sur l’OFPRA et l’analyse de ses évolutions depuis le milieu du XXe siècle.
L’intervention montrera comment les questions géopolitiques, les intérêts politiques, les politiques publiques et leurs usages par les acteurs, ainsi que les dispositifs organisationnels ont contribué à façonner les catégories telles que nous les connaissons aujourd’hui et construire des distinctions, des hiérarchies et des légitimités.
Séance 12 – le 20 mai 2021
Une séance avec Juliette Duclos-Valois (EHESS), discutée par Alexia al-Azzawi Martin (CHERPA/Ifpo).
Difficultés d’accès à un terrain « à risque »
Pour cette séance, je me propose d’ouvrir une discussion sur les difficultés à mener une enquête en terrain à risques. À partir d’une présentation qui s’appuiera notamment sur l’extrait d’analyse ci-joint, je déplierai une série de questionnements d’ordre méthodologique et réflexif. Il sera notamment question de l’implication du chercheur et ici particulièrement de la chercheuse, des relations intersubjectives, des affects engagés dans l’enquête, des compétences linguistiques, de l’enquête hors site et du statut des matériaux produits. L’objectif est d’explorer comment les problèmes d’accès, les aléas, les biais de sélection peuvent être vecteurs de savoir.
Séance 11 – le 5 mai 2021
Une séance avec Kamel Doraï (Ifpo/Migrinter), organisée par Héloïse Peaucelle (Citeres/Ifpo).
Construction et évolution d’un objet de recherche. Du terrain aux cadres d’analyses.
L’objectif de cette présentation sera de retracer le cheminement d’un parcours de recherche, en partant de la définition d’un sujet de recherche (les camps de réfugiés palestiniens au Liban) à celui d’un objet de recherche (la relation mobilité / installation dans un contexte de migration forcée). Je retracerai l’évolution de mon approche et celle de mes cadres d’analyse en lien avec les recherches de terrain. Je tenterai de présenter les évolutions croisées de la recherche de terrain, de la méthodologie et des cadres théoriques employés.
Je partirai d’une recherche réalisée sur les camps de réfugiés palestiniens du sud Liban et des migrations de ces réfugiés vers la Suède (Cf. article joint).
Séance 10 – le 22 avril 2021
Une séance avec Cédric Parizot, chargé de recherche au CNRS et directeur adjoint de l’Institut de Recherche et d’Etude sur le Monde Arabe et Musulman (UMR7310), organisée par Clémence Vendryes et Alexia al-Azzawi Martin.
Penser la relationnalité en termes d’involutions : une étude de cas israélo-palestinienne
La communication portera sur plusieurs formes de circulations et d’activités informelles que déploient des Palestiniens pour gagner leurs salaires, continuer à pratiquer certains loisirs, ou encore survivre. Elle nous mènera d’un chantier au cœur d’Israël, le long de la route numéro 1 qui traverse la Cisjordanie pour rejoindre les rives de la mer Morte jusqu’à un camp de réfugié au sud de Bethlehem.
A travers trois exemples ethnographiques, nous aborderons une forme spécifique de relations qui émerge régulièrement entre Palestiniens et Israéliens, à savoir les relations d’involution. Cédric Parizot emprunte cette notion à Gilles Deleuze et Felix Guattari pour évoquer les formes de détournement que certains acteurs (israéliens ou palestiniens) peuvent développer à partir des trajectoires de leurs compagnons de routes ou de leurs adversaires afin d’atteindre des objectifs qui entrent en contradiction avec ceux de ces derniers, mais qui ouvre temporairement des lignes de devenir communes et surtout des rapports d’interdépendance entre ces deux populations. Le terme d’involution fait ensuite référence aux devenirs minoritaires que provoquent ces détournements au sein des personnes, des collectifs ou des institutions qui en font l’objet et qui ne sont pas toujours donné à leur conscience.
Cette analyse montre combien les efforts que déploient les Palestiniens pour échapper au système de surveillance israélien reposent autant sur le contournement que le détournement du fonctionnement de ces dispositifs. Autrement dit, ils ne déjouent pas uniquement ce contrôle en l’évitant, mais aussi en se réappropriant, en réorientant et en requalifiant son fonctionnement. Mais bien au-delà du terrain israélo-palestinien, l’étude des processus d’involution offre la possibilité de penser les relations entre des populations non plus uniquement en fonction de leur identité et de leur différence, ou de leur rapport de filiation, mais aussi à travers des logiques de propagation et de contamination. Ceci permet alors de sortir de l’approche essentialiste et particulariste véhiculée par le nationalisme méthodologique. Ainsi, plutôt que d’appréhender les personnes, les collectifs ou les institutions que définissent les catégories sociales et ethniques comme autant d’entités organiques pures et distinctes les unes des autres, elle permet de les envisager comme des multiplicités mues par des trajectoires disjointes et discontinues qui se reconfigurent à travers des dynamiques relationnelles. Elle permet ainsi de penser les relations d’interdépendance, de continuité et d’enchevêtrement entre ces personnes et ces groupes tout en prenant en compte leurs différences et leurs singularités.
Séance 9 – le 1er avril 2021
Une séance avec Camille Schmoll (Université Paris Diderot – Géographie-Cités), organisée par Solenn Al Majali (Université Aix-Marseille/Ifpo),
Une approche genrée dans les travaux en sciences sociales
Ce Webinaire se propose de problématiser la question d’une approche genrée dans les travaux en sciences sociales. Nous reviendrons sur l’importance d’intégrer la question du genre tant au niveau de nos objets d’étude, qu’au niveau méthodologique. Que nous apprend une approche par les femmes dans le champ des études migratoires ? Quelles formes nouvelles de savoirs nous apporte cette démarche pour nos recherches ? La thèse est aussi un exercice intéressant de réflexivité par rapport à notre position sur le terrain. En tant que doctorantes et jeunes chercheures, comment interroger notre statut de femme dans notre pratique du terrain ?
Séance 8 – le 18 mars 2021
Une séance avec Myriam Catusse (Iremam), organisée par Emmanuelle Durand (EHESS/Ifpo) et Héloïse Peaucelle (Université Tours/Ifpo)
Du terrain à l’écriture
En première partie, Emmanuelle Durand exposera les challenges de rédaction à partir de son expérience : Comment allier composantes théoriques et empiriques ? Quelles méthodes face à la difficulté de maintenir le fil rouge tout en écrivant « dans le désordre » Plongée dans l’exercice d’écriture, j’ai parfois du mal à porter un regard neuf et « frais » sur les pages rédigées. Quelles astuces pour réussir à prendre du recul et de la distance sur ce que nous rédigeons ? Comment distinguer digression et approfondissement du détail et comment hiérarchiser ces informations dans le manuscrit ?
Dans la seconde partie, Myriam Catusse discutera les questionnements évoqués à partir de ses travaux, afin de répondre à cette question générale : Comment articuler les différentes étapes de l’écriture dans un travail de thèse ?
Dans quelle mesure, la restitution du terrain sous forme de carnet ou de retranscription d’entretien est-elle le matériel souche, garante de la réalité et de l’objectivité ? Comment réutiliser les premières productions écrites (carnet de terrain – retranscriptions…) sans s’éloigner de l’objectivité initiale du terrain ? En quoi l’écriture de la thèse constitue elle une réécriture des précédentes étapes d’écriture (publications, documents personnels) et quand faut-il s’en éloigner ? Si la rédaction de thèse n’obéit à aucune règle spécifique, existe-t-il des « facilitateurs d’écriture » à suivre dans la rédaction ?
Séance 7 – le 4 mars 2021
Présentation des sujets de thèse des nouvelles doctorantes du DEC et du DEAMM
Présentation du sujet de thèse de Mariette Ballon (Ifpo TP – Université Lumière Lyon 2)
Quelle représentation des travailleurs en Palestine ? Analyse des pratiques et des formes d’action au sein de la Palestinian General Federation of Trade Union (PGFTU).
Alors que le combat des militants palestiniens nationalistes est iconique, on connait encore trop peu le quotidien de la société civile palestinienne, ses mondes du travail et les institutions qui les structurent. Les recherches en science politique en Palestine se sont davantage concentrées, ces dernières années, sur les questions internationales et les négociations passées entre les parties palestiniennes et israéliennes au détriment des institutions politiques et leur fonctionnement propre. S’atteler à la connaissance des mondes du travail palestiniens en passant par le prisme syndical apparaît d’autant pertinent que cela permet d’interroger plusieurs aspects de ces derniers : la question des luttes au travail, de la représentation des travailleurs, des formes du syndicalisme et du rôle politique des institutions liées au travail en Palestine.
Présentation du sujet de thèse de Natalie Smrekar (Ifpo Beyrouth – Université Grenoble Alpes)
Alors que la croissance démographique de la communauté chiite voit son pouvoir politique s’affirmer comme incontournable au début du XXIème siècle, il apparaît d’une grande importance d’étudier la façon dont les représentants du chiisme politique libanais communiquent. Le discours du leader du Hezbollah, Hassan Nasrallah, témoigne d’une influence dépassant largement le périmètre chiite et la scène intérieure libanaise. Afin de dégager les caractéristiques les plus distinctives de son discours, nous aurons recours à la méthode de l’analyse de la sémiologie linguistique et nous focaliserons sur le lexique et l’usage de la variation linguistique arabe. Autrement dit, nous nous fonderons sur la lexicologie et la dialectologie arabes. À la différence de Nabih Berri, leader du parti chiite Amal, Hassan Nasrallah est un fin connaisseur la langue arabe. Rien n’est fortuit ou laissé au hasard dans ses déclarations : le mot, le verbe, le registre linguistique, la gestuelle.
Notre hypothèse de départ est qu’en tant que leader politique et religieux, Hassan Nasrallah utilise la langue d’une manière tout à fait stratégique, réfléchie, adaptant son registre linguistique en fonction du public, de la conjoncture et au service de ses intérêts politiques. Le but de ce travail vise à mieux comprendre les stratégies mises en œuvre dans ses discours pour gagner en adhésion et en influence.
Présentation du sujet de thèse – Nina van Kampen (Ifpo-Beyrouth, Cermom Inalco) lauréate de la bourse michel seurat
Titre de la thèse : Contact dialectal et accommodation linguistique : le cas des réfugiés palestiniens à Beyrouth, sous la direction de Georgine Ayoub et Bruno Herin
Partant du constat que la langue est au cœur des interactions sociales entre Libanais et Palestiniens au Liban, et que celle-ci donne lieu à des catégories et catégorisations sociales, cette recherche en sociolinguistique se propose de contribuer à identifier les contours des identités multiples et mouvantes des Palestiniens en exil, en utilisant la langue comme outil d’analyse.
En empruntant aux méthodes de l’anthropologie, ce travail enquête sur le rôle des pratiques et représentations langagières dans les constructions identitaires et se fonde sur l’élaboration d’un corpus d’entretiens et de conversations recueillis auprès des membres de la communauté palestinienne de Beyrouth. La variation que nous retrouvons dans les pratiques langagières permet d’appréhender la complexité et la diversité des pratiques sociales et spatiales des individus sous un nouvel angle. Ainsi, un fort maintien de formes linguistiques palestiniennes pourrait être révélateur de la ségrégation et de la marginalisation des Palestiniens du Liban, comme d’un attachement particulier au territoire et aux localités de Palestine.
En plus d’enquêter sur la relation entre langue et identité, notre objectif est aussi de contribuer à la connaissance des variétés parlées de l’arabe dans le territoire d’origine des informateurs. Cela nous permettra de reconstituer des pièces manquantes dans la connaissance de l’arabe palestinien, que la migration forcée a fragmenté, tout en dévoilant les effets du contact avec les populations (libanaises et palestiniennes) sur place.
Présentation du sujet de thèse de Lyla André (Université de Louvain)
Le contexte de la crise syrienne et de ses conséquences dans les principaux pays d’accueil des réfugiés au Moyen-Orient est le cas d’étude par excellence qui permet d’étudier la mise en œuvre de la nouvelle approche de l’Union européenne des crises humanitaires, approche articulée autour de la construction de la « résilience ». En 2013, la Commission européenne publie « a Comprehensive approach to the Syrian crisis » qui intègre l’aide humanitaire à un agenda plus large de politique étrangère. En 2014, le fonds fiduciaire « MADAD » est établi afin de faire transiter la majeure partie de l’aide européenne vers les principaux pays d’accueil des réfugiés syriens, en lien avec les conclusions du Conseil sur l’approche européenne en matière de Résilience (Mai 2013) et le plan de réponse de la communauté internationale mené sous l’égide des Nations Unies « Regional Resilience and Refugee Plan » (3RP). Tout en mettant graduellement l’accent sur la résilience de l’individu, des communautés, de la société et de l’Etat, le fonds « MADAD » est censé répondre à cette exigence de pallier la division entre l’assistance humanitaire de court terme et l’aide au développement inscrite dans le long terme.
Si l’on se penche sur les fondements à partir desquels la nouvelle approche européenne de gestion des crises humanitaires est construite, notre objectif est également d’en étudier la réalisation pratique dans le contexte libanais, en observant tout particulièrement les rapports entre les différents acteurs nationaux & internationaux, ainsi que les conséquences de ces rapports pour les réfugiés. Considérant que l’UE s’appuie prioritairement sur la thématique de « l’éducation en situation d’urgence » pour développer son objectif de construire la résilience des réfugiés, notre cas d’étude porte sur les projets financés par l’UE dans le secteur de l’éducation à destination des enfants réfugiés syriens au Liban.
Séance 6 – le 18 février 2021
Une séance organisée par Elsa MAARAWI (Amiens/Ifpo), avec Anna Poujeau (Ifpo
Faire des recherches sur la Syrie aujourd’hui : comment construire son objet et établir son protocole d’enquête ?
Le conflit en Syrie a durablement affecté nos façons de faire du terrain et de produire des connaissances sur la société syrienne. La construction de nos objets d’étude dans ce cadre passe plus que jamais par une réflexion rigoureuse sur nos méthodes et sur des questions d’éthiques. Pour ce séminaire Anna Poujeau reviendra sur sa propre expérience de chercheure travaillant sur la Syrie avant le conflit (depuis 2002) et après la révolution de 2011 en mettant en lumière les changements des pratiques et l’évolution des protocoles d’enquêtes.
Séance 5 – Le 7 janvier 2021
Invité : Simon Dubois, chercheur à l’Ifpo d’Amman, auteur de la thèse thèse « De la marge au centre, de Syrie en exil : itinéraires d’un jeune théâtre syrien ».
La construction de mon objet de thèse : bricolages et limites.
Cette séance sera l’occasion de revenir sur la construction empirique de l’objet de ma recherche. J’essaierai de pointer les limites, difficultés et impasses qu’elles soient théoriques, éthiques ou personnelles qui ont été, au final, constitutives de ma recherche doctorale. Les doctorant-e-s sont invité-e-s à critiquer, déconstruire et à proposer des alternatives pratiques et théoriques pour enrichir une refonte de cet objet.
Séance 4 – le 17 décembre 2020
Une séance organisée par Héloïse Peaucelle (Université de Tours/Ifpo), avec William Berthomière (CNRS/PASSAGES)
Les formes d’écritures alternatives en sciences sociales (2) : Enquêter par l’image : positionnements de recherche et méthodologies de terrain
A travers l’expérience de différents projets de recherche sur les mobilités dans des contextes géographiques distincts (métropolitains et ruraux), cette présentation se donne pour objet de présenter divers aspects de la plus-value que compose l’intégration de l’image dans une démarche de recherche. Une attention particulière sera également portée aux modes de restitution des travaux et à leurs incidences sur la nature des produits de la recherche. Sur un plan théorique, l’ensemble de l’intervention mettra en lumière des contributions possibles à la notion de présence.
Séance 3 – le 3 décembre 2020
Une séance organisée par Emmanuelle Durand (EHESS/Ifpo), avec Nicolas Puig (anthropologue, IRD)
Les formes d’écritures alternatives en sciences sociales (1) : le film ethnographique
Parmi les formes d’écritures alternatives, les chercheurs en sciences sociales sont de plus en plus nombreux à se saisir de l’outil du film ethnographique. Souvent réalisé à quatre mains en étroite collaboration avec un artisan de l’économie culturelle du cinéma, le film ethnographique donne à voir et à attendre des récits tirés d’enquêtes de terrain au long cours. Par le potentiel sensible de l’image alliée au son, il permet une observation, une analyse et un questionnement de la vie sociale. Il est outil aussi un outil précieux au service de la diffusion auprès d’un public varié.
D’un point de vue méthodologique, plusieurs questions se posent. Pourquoi et comment fabrique-t-on un film documentaire ? En quoi l’écriture filmique est-elle complémentaire de l’écriture académique ? Avec cette double casquette, comment se positionne-t-on vis-à-vis des personnes filmées /enquêtées dans des contextes moyen-orientaux où le recours à l’image est souvent sensible, objet de méfiance ?
« La cause du rap », un film réalisé par Nicolas Puig (anthropologue) et Justin de Gonzague (auteur et réalisateur), illustre parfaitement ces enjeux. À partir de son expérience de la fabrique d’un film, Nicolas Puig reviendra sur la genèse du projet, ses modalités de réalisation, son écriture et sa diffusion.
Séance 2 – Le 17 novembre 2020
Présentation du sujet de thèse de Rouba Wehbe, doctorante AMI à Beyrouth, discutée par Valérie Clerc (CESSMA/ IRD).
Les sous-marchés du logement à Beyrouth. L’informalisation segmentée du marché formel dans un contexte d’inertie et d’insécurité de la tenure foncière.
Cette recherche examine les sous-marchés du logement opératifs dans les quartiers formels et centraux de Beyrouth et dont la tenure évolue en insécurité et/ou en inertie. Elle emploie, comme cadre d’analyse, la théorie de différentiel de rente foncière (TDRF) visant, dans un premier temps, à comprendre les formes de mutations engendrées par ces sous-marchés. Dans un second temps, elle explore les dynamiques qui existent entre ces sous-marchés et le marché formel à l’échelle de la ville. En s’appuyant sur des entretiens et une consultation d’archives (publiques et privées), deux cas d’études sont examinés : le parc immobilier des réfugiés palestiniens et celui à location précaire dans les quartiers centraux. Les résultats montrent que ces sous-marchés aboutissent à une informalisation par segment du marché formel. Ainsi, lorsque dans ce dernier le différentiel de rente (DR) observé génère de la gentrification, celui observé dans ces sous-marchés crée de l’informalisation. Une nouvelle forme de mutation est alors examinée par la TDRF, dissociant cette dernière de la gentrification et l’affirmant plutôt comme une théorie de rente. Alors que dans le cas de l’insécurité foncière, l’informalisation accélère le processus de gentrification, dans le cas d’une tenure en inertie, l’informalisation a ici sa propre logique d’expansion s’opposant à celle de la gentrification. Finalement, appréhender l’économie politique urbaine des sous-marchés à Beyrouth permet d’alimenter la réflexion sur les politiques publiques du logement, jusqu’à présent, quasi inexistantes dans l’action politique dans le pays.
Intervenante : Rouba Wehbe est architecte et urbaniste de formation, actuellement doctorante à l’école de sociologie à Sciences PO, Paris. Sous la direction d’Éric Verdeil, elle travaille sur la théorie de différentiel de rente foncière dans un continuum formel-informel de la tenure. Son expérience de recherche, sur le cas de Beyrouth notamment, comprend les thématiques suivantes : la stigmatisation urbaine et sa corrélation avec la production du logement abordable ; la stigmatisation urbaine et les mouvements politiques de contestation ; la violence urbaine ; la construction sociale de l’espace public.
Séance 1 – Le 5 novembre 2020
Présentation du sujet de thèse de Livia Perosino, doctorante AMI à Amman.
L’agriculture en Jordanie : entre intégration dans les dynamiques globales et production locale
Suite à un mémoire de master qui m’a permis de me familiariser avec le secteur agricole jordanien, je compte approfondir l’étude des orientations des politiques agricoles dans le contexte jordanien. Les crises alimentaires récurrentes ayant montré les limites d’un modèle alimentaire global très dépendant des échanges internationaux, nombreux sont les pays qui ont affiché des velléités de réduire leur dépendance aux importations alimentaires. Dans ce contexte, la Jordanie représente un cas particulièrement problématique : le pays dépend des importations pour satisfaire entre 80 et 90% de sa demande interne en biens alimentaires, est caractérisé par un stress hydrique élevé et par un territoire en grande partie désertique. Si l’agriculture a longtemps été considérée comme une question stratégique, à partir de 1989, suite à l’application des Plans d’ajustement structurels (PAS), le secteur a subi une dégradation importante. Je compte m’intéresser aux objectifs actuels de la politique agricole jordanienne, à ses modalités concrètes ainsi qu’aux visions du développement économique et agricole. J’analyserai les rapports de pouvoir sous-jacents, ainsi que les conséquences effectives sur les modes de production agricole jordaniens.
Intervenante : Livia Perosino est doctorante en première année au laboratoire Les Afriques dans le monde (LAM) de Sciences Po Bordeaux. Diplômée d’un master en Sciences politiques sur la région Méditerranée et Moyen-Orient à Sciences Po Grenoble, elle s’est intéressée à la politique agricole jordanienne au cours de la rédaction de son mémoire de master. Elle continue ses recherches grâce à l’obtention d’une Aide à la mobilité (AMI) de l’Ifpo en 2020. Sa thèse porte sur les grandes orientations de la politique agricole en Jordanie, à ses modalités concrètes ainsi qu’aux visions du développement économique et agricole. Les rapports de pouvoir et les conséquences effectives sur les modes de production agricole jordaniens et sur les différents acteurs du secteur sont également des questions centrales dans ses recherches.