Revue de presse Gouvernance et politiques publiques | avril 2021

Nouveau pic du Coronavirus

Après que trois personnes soient décédées de la Covid-19 avant même d’avoir pu accéder à des soins devant un hôpital à Sohag, plusieurs voix se sont élevées pour appeler à de nouvelles mesures pour lutter contre l’épidémie. Les hôpitaux d’isolement du gouvernorat seraient saturés. Le responsable du Syndicat des médecins à Sohag a appelé à la mise en place d’un couvre-feu strict dans le gouvernorat après la mort de cinq médecins en trois jours, dont quatre âgés entre 32 et 36 ans. Cependant, la Ministre de la Santé a nié ces informations, en parlant d’une légère augmentation des cas et affirmant que des lits étaient toujours disponibles dans les hôpitaux d’isolation.

Fin avril, la Ministre de la Santé a cependant  annoncé que le taux de contamination national était cinq fois plus élevé que l’année précédente à la même époque. Plus de 1000 contaminations quotidiennes ont été enregistrées à la fin du mois, pour la première fois depuis début janvier. Comme l’année dernière, les rassemblements pour célébrer Pâques et la fête du Printemps Sham el Nessim ont été interdits dans les espaces publics, et les plages et les parcs fermés pour l’occaison. D’autres mesures ont été mises en place au début du Ramadan mi-avril. Dans les mosquées, qui ouvrent seulement 10 minutes avant le début de la prière, les pratiquants doivent porter le masque et respecter les distances sociales, les Tarawih, les prières de nuits, sont raccourcies et les pratiquants ne sont pas autorisés à passer la nuit dans la mosquée. Les ruptures du jeûne ne sont pas autorisées dans les mosquées. Avec le passage aux horaires d’été, les magasins ferment à 23h la semaine et à minuit le weekend, et les cafés et restaurants sont autorisés à rester ouverts jusqu’à 1h du matin.

Production locale du vaccin CoronaVac

Un accord a été signé entre l’Egypte et la Chine pour la production locale de 40 millions de doses du vaccin Coronavac au cours de la prochaine année. L’entreprise gouvernementale égyptiennen Vacsera a ainsi signé un double accord avec l’entreprise chinoise Sinovac pour obtenir les licences de la technologie du vaccin, de sa production et ses droits de distribution en Egypte. Ce vaccin est le cinquième à recevoir l’approbation de l’Autorité égyptienne des médicaments, et devrait être utilisé en cas d’urgence.  Les autres vaccins approuvés sont Sinopharm, AstraZaneca, Johnson&Johnson et Sputnik V. Ce dernier devrait également être produit prochainement en Égypte.

Accidents de train :  trouver les « coupables »   

Un nouvel accident de train est survenu à Toukh, à Qalyubia le 18 avril, dans lequel 11 personnes ont trouvé la mort et 97 ont été blessées, ceci très peu de temps après un accident meurtrier à Sohag le mois dernier. 23 cheminots ont été arrêtés à la suite de l’accident, parmi lesquels le conducteur et son assistant, ainsi que des techniciens. 6 autres employés des chemins de fer avaient été arrêtés fin mars suite à l’accident de Sohag. Par ailleurs, les résultats de l’enquête menée par le Procureur général sur l’accident ferroviaire de Sohag, qui a fait 20 morts, suggèrent que la négligence et l’abus de drogues de la part des employés des chemins de fer aient contribué à l’incident fatal.

Les accidents de trains sont fréquents, et alors que leurs causes sont généralement multiples, parmi elles des défaillances matérielles, les employés des chemins de fers sont souvent désignés comme les responsables. Dans cette veine, le Ministre des transports a demandé au Parlement de licencier 162 cheminots pour « participation à des activités radicales et agitatrices et abus de drogues » ainsi que de modifier la loi sur la fonction publique afin de pouvoir licencier les « extrémistes », les « saboteurs » et les « toxicomanes » travaillant dans les installations ferroviaires du pays, qualifiant ce dernier accident de sabotage. La responsabilité de la récente fréquence des accidents ferroviaires a été une nouvelle fois rejetée sur les « membres des Frères musulmans » et les « éléments radicaux », accusations qui ont été reprises par certains députés. Des employés de l’État ont déjà été licenciés en masse suite à des accusations d’appartenance à la confrérie, le ministère de l’éducation ayant licencié 1 070 enseignants en 2019 pour le même motif. Par ailleurs, le Premier ministre a publié un nouveau décret permettant le transfert des employés de l’autorité ferroviaire devant les tribunaux d’urgence de la sûreté de l’État pour « crimes commis pendant et en raison de l’exercice de leur travail ». Ce décret est applicable jusqu’à la fin de l’état d’urgence, qui a d’ailleurs été renouvelé ce mois-ci pour la 17ème fois consécutive depuis sa mise en application en octobre 2014.

Le ministre Kamal Al-Wazir a également mentionné dans la presse un nouveau plan de formation pour les cheminots à l’Académie militaire, afin de leur enseigner « la discipline, l’efficacité et la gestion » en plus de leur formation technique.

Réformes du FMI – 2nde phase

Le premier ministre Moustafa Madbouly a présenté la seconde phase du plan de réformes économiques du FMI lors d’une conférence de presse. Rappelons qu’un premier prêt de 12 millions de dollars sur trois ans avait été signé en 2016. Une seconde aide financière a été fournie par le FMI depuis le début de la crise de la Covid 2019: 2,77 milliards de dollars ont ainsi été prêtés à l’Égypte via le programme de financement rapide, et 5,2 milliards de dollars via un « accord de confirmation ».

Cette seconde phase des réformes devrait se concentrer sur le développement industriel, l’expansion des partenariats public-privé et la production d’eau.

Le développement industriel privilégiera les secteurs manufacturier, agricoles et des télécommunications, qui devraient contribuer entre 26 et 35% au PIB national d’ici 2024 et permettre la création de 400 000 emplois. L’objectif est également que les exportations agricoles atteignent 25% de l’ensemble des exportations d’ici 2024, contre 17% en 2020 ; la production agricole devrait augmenter de 30%. La croissance économique visée s’élève à 6 ou 7 % d’ici les trois prochaines années.

Renouer avec la Turquie

Le 1er avril, les ministres des affaires étrangères de la Turquie et de l’Égypte se sont appelés pour la première fois depuis la rupture des liens diplomatiques entre les deux pays en août 2013 après la destitution de Mohamed Morsi. Après des mois de négociations, la Turquie avait annoncé en mars le rétablissement de sa relation avec l’Égypte, qui a pourtant nié tout rapprochement officiel. Dans cette perspective, la Turquie avait également proposé d’aider l’Égypte lors du blocage du Canal de Suez pendant une semaine en mars. La question des liens entre les autorités turques et la confrérie des Frères musulmans est au cœur du dossier. Mi-mars, les autorités turques ont fait un premier pas en ordonnant aux chaines télévisées affiliées à la confrérie et basées en Turquie d’arrêter de critiquer les autorités égyptiennes. Au cours des pourparlers, ces dernières exigeraient de l’État turque la suspension des activités de la confrérie sur son territoire, ainsi que la remise de deux de ses membres à l’Égypte, Yahya Moussa et Alaa al-Samahi.

Le conflit libyen semble être également un enjeu important de cette réconciliation, le processus de négociation ayant été ralenti parce que le retrait de troupes mercenaires turques en Libye serait jugé trop lent par le Caire.  Les frontières maritimes entre les deux pays sont un point également central des discussions en cours.

Le GERD

L’Éthiopie a commencé à déforester la zone qui sera submergée après le remplissage du barrage. Face à cette initative, le Président Abdel Fattah al-Sissi  a mis en garde son voisin : « We should not reach the level that you mess with a water drop in Egypt, because all options are open ». Le ministre de l’Irrigation et de la Ressource en eau égyptien identifie le barrage de la Renaissance et la surpopulation comme les deux menaces principales pesant sur le pays. Le Premier ministre éthiopien a souligné que le remplissage devrait épargner au Soudan des inondations comme l’année passée. Ce dernier menace cependant d’intenter une action en justice contre la société italienne responsable du remplissage. À l’initiative de Naglaa Abul Magd, plusieurs femmes influentes d’Égypte, du Soudan, du Sud-Soudan, du Tchad et d’Ouganda ont lancé la coalition « Women of the Nile Basin ». L’objectif est de manifester le soutien des pays du bassin versant à l’Égypte et de promouvoir une coopération pacifique et respectueuse. La ministre de l’Immigration a encouragé les Égyptiens de l’étranger à publier sur les réseaux sociaux des vidéos soutenant le droit de l’Égypte sur les eaux du Nil. Plusieurs pays arabes ont apporté leur soutien à l’Égypte alors que le ministre des Affaires étrangères entamait une série de visites sur le continent africain pour rallier des soutiens. Dans le même temps, le Soudan en appelle au Conseil de Sécurité de l’ONU.