Revue de presse Gouvernance et politiques publiques | novembre 2020

Coronavirus : 2nde vague

En attendant le vaccin, les médecins sur le front

Après que Ministre de la Santé Hala Zayed ait confirmé que l’épidémie du Coronavirus était en train de reprendre en Égypte, le Président al-Sissi a appelé les Égyptiens à respecter les mesures barrières, estimant que le vaccin ne serait pas disponible avant plusieurs mois.

En effet, en plus de développer son propre vaccin et de réaliser des essais du vaccin Chinois développé par Sinopharm, l’Égypte aurait déjà précommandé deux vaccins, celui de Pfizer-BioNTech et celui d’Oxford-AstraZeneca. Les doses commandées couvriraient 50% de la population.

Face à cette second vague, le Ministère de la Santé a annoncé l’ouverture du recrutement de 1200 médecins pour les hôpitaux universitaires. De même, comme lors de la première vague, le Ministère a annoncé la suspension des congés pour le personnel soignant et décidé de reporter le départ à la retraite de deux années– normalement à 60 ans –  pour 728 médecins.

Les gouvernorats du Caire, d’Alexandrie, de Gharbiya et de Louxor seraient les plus touchés par la seconde vague jusqu’à présent. Bien que de nombreux cas d’infection aient été signalés dans les écoles et les universités, leur fermeture est pour l’instant exclue. Plusieurs agences gouvernementales, entreprises publiques (notamment la Société générale égyptienne du pétrole) et gouvernorats ont annoncé la réduction temporaire des travailleurs sur leur lieu de travail.

Rétribution des familles de médecins décédés

Pendant ce temps, le nombre de médecins qui décèdent du Coronavirus s’élève à nouveau rapidement. Plus de 200 médecins sont décédés de la Covid-19 depuis le début de la crise.

Ceci relance le débat sur le soutien accordé aux familles des médecins décédés. En effet, d’après un rapport publié par Al Manassa, plusieurs familles font face à un vide administratif les empêchant de recevoir l’aide normalement accordée suite à un décès survenu dans des circonstances professionnelles. Alors que la mort liée au coronavirus a été classée par l’Autorité de l’assurance maladie comme étant un accident du travail, la Covid-19 ne serait pas encore répertoriée comme cause de décès sur le système numérique utilisé par les bureaux de santé et les registres d’état civil. Suite à ces révélations, le Syndicat des Médecins a demandé au ministère de la Santé d’intervenir afin d’enregistrer la Covid-19 comme maladie du travail pour les médecins.

Parallèlement, plusieurs universités (notamment l’Université de Beni Suef, l’Université d’Ain Shams et l’Université du Caire) ont annoncé l’exemption de frais d’université pour les enfants de médecins décédés de la Covid-19.

Soutien économique face à la seconde vague

D’après le Ministre des Finances, un nouveau Fonds devrait être mis en place pour faire face à cette seconde vague. Mohamed Maiet a affirmé que le pays n’avait dépensé que 65 milliards des 100 milliards EGP alloués pour la première vague, dépensés en majorité pour afin de fournir des équipements médicaux, des subventions aux travailleurs informels, des produits de base et les salaires des médecins et des infirmières.

1,7 millions de travailleurs informels doivent recevoir ce mois-ci l’aide mensuelle de 500 EGP mise en place au début de la pandémie. La distribution de cette aide pour le mois de novembre – originellement prévue le 16 – a été retardée par une réévaluation de la base de données des personnes bénéficiaires et un renforcement des critères requis pour recevoir la subvention.

Élections parlementaires – suite

La seconde phase du 1er tour des élections parlementaires a eu lieu début novembre au Caire, à Qalioubiya, Daqahliya, Menoufiya, Gharbiya, Kafr El-Sheikh, Sharqiya, Damiette, Port Saïd, Ismaïlia, Suez, dans le nord et le sud du Sinaï. Un taux de participation de 29,5 % a été enregistré, avec 9,2 millions de votants sur 31 millions d’électeurs éligibles, d’après l’Autorité Nationale Électorale (ANE). Comme lors de la 1ère phase, la liste « Pour l’Égypte », portée par le Parti du Futur de la Nation a remporté les 142 sièges sur liste à l’issue de cette seconde phase du 1er tour ( dominant ainsi les 284 sièges sur liste). Le Parti du Futur de la Nation a également remporté 59 sièges individuels sur les 73 pourvus dès le 1er tour (32 sièges pourvus au total après la 1ère phase et 41 après la 2nde phase).

Tous les sièges présentés sur des listes ayant été remporté par la liste « Pour l’Égypte », le 2nd tour voit donc s’opposer des candidats sur des listes individuelles. 220 candidats se sont disputés les 110 sièges restants lors de la 1ère phase du 2nd tour qui a eu lieu entre le 21 et le 25 novembre. Les résultats ne sont pas encore officiels mais il semble que le Parti du Futur de la Nation a gagné de nombreux sièges dans la plupart des gouvernorats concernés.

Concernant la 2nde phase du 2nd tour, qui se déroulera entre le 5 et le 8 décembre, 200 candidats se disputeront les derniers 100 sièges individuels. Les 5 % restants, soit 28 sièges, seront désignés par le Président de la République.

Un règlement pour le nouveau Sénat

Les 300 membres du Sénat devaient se réunir à la fin du mois pour discuter des 293 articles du règlement intérieur qui régira les procédures de la Chambre-Haute. Le règlement intérieur prévoit la création de 14 commissions : affaires constitutionnelles et législatives ; affaires étrangères, arabes et africaines ; défense et sécurité nationale ; droits de l’homme ; solidarité sociale ; affaires financières, économiques et d’investissement ; industrie et commerce ; énergie, environnement et main-d’œuvre ; logement, administration locale et transport ; éducation, jeunesse et sports ; santé et population ; agriculture et irrigation ; culture, médias, tourisme et antiquités ; religion et waqf.  Une commission éthique, dirigée par l’un des deux adjoints du président du Sénat et réunissant les responsables de chacune des 14 commissions ainsi que quatre membres supplémentaires devrait également être créée. Contrairement à la Chambre des représentants, il semble que le Sénat n’aura pas de pouvoirs législatifs. D’après les discussions en cours, les réunions des commissions du Sénat seront probablement fermées à la presse. Une fois terminé, ce règlement sera examiné par le Conseil d’État, puis discuté au Sénat le mois prochain.

Autres actualités

Trois employés de l’Initiative Égyptienne pour les Droits Personnels (EIPR), une organisation pour la protection des Droits de l’Homme, ont été arrêtés mi-novembre. Accusés dans les médias de conspirer contre l’Égypte et de nuire à sa réputation à l’étranger, leur arrestation, qui serait liée à une réunion avec de nombreux ambassadeurs quelques semaines plus tôt, a suscité de nombreuses réactions de la communauté internationale. La France a notamment exprimé sa « vive préoccupation » face à ces détentions, ce qui a été qualifié d’ingérence par le Ministère des affaires étrangères égyptien, regrettant que la France défende une entité opérant illégalement sur le territoire égyptien. En effet, les autorités égyptiennes considèrent que l’EIPR, enregistrée en tant qu’entreprise, exerce des activités en violation de la nouvelle loi 149/2019, largement controversée et restrictive, relative aux ONG. Ces trois personnes ont été relâchées Vendredi 04 décembre.

L’affaire Regini, du nom du doctorant italien qui avait été retrouvé mort le 3 février 2016 aux environs du Caire après avoir disparu pendant plusieurs jours, semble connaitre de nouveaux retentissements. Cette enquête compliquée ne semblait pourtant plus être un enjeu fondamental des relations diplomatiques et économiques égypto-italienne. Si l’Italie avait rappelé son ambassadeur en avril 2016 face au manque de coopération des autorités égyptiennes, un nouvel ambassadeur avait finalement été nommé un an et demi plus tard. Au point mort depuis des mois, l’Italie a cependant relancé l’affaire en annonçant la poursuite de cinq agents de sécurité égyptiens pour le meurtre de Giulio Regini.

L’arrestation de Patrick Georges Zaki, chercheur à l’EIPR et étudiant à Bologne, au Caire en février 2020, avait fait écho à cette affaire et relancé le débat intra-italien sur les relations égypto-italiennes.

GERD

Concernant le Grand Barrage de la Renaissance, les tensions ne semblent pas s’apaiser alors que le ministre égyptien de l’Irrigation et des Ressources en eau accuse l’Éthiopie de manipuler la communauté internationale. Par ailleurs, soulignant qu’elles tournaient en rond, le Soudan a refusé de reprendre part aux négociations le 21 novembre, générant de nouvelles tensions lorsque l’Égypte et l’Éthiopie ont décidé de maintenir la rencontre. Le pays appelle en effet depuis plusieurs mois à changer la méthodologie des négociations, notamment par une médiation directe de l’Union Africaine et/ou de l’Union européenne. Après son voyage en Égypte, le Président du Conseil européen avait réaffirmé début novembre l’investissement de l’UE sur la question. Le conflit armé qui oppose le gouvernement éthiopien au Front de Libération du Peuple du Tigré (FLPT) au nord du pays depuis début novembre et qui a déjà causé le déplacement de plus de 30 000 personnes de cette région vers le Soudan pourrait bien ralentir les travaux du barrage. L’Éthiopie craint notamment que le Soudan n’apporte son soutien au Tigré et n’utilise ce conflit pour tourner les négociations à son avantage. Quoi qu’il en soit, elle affirme que le GERD produira de l’électricité à partir de juin 2021.